Brève : Le virement instantané sur les fonts baptismaux

Transférer jusqu’à 15 000 euros en moins de 10 secondes, c’est la promesse du virement SEPA instantané (SCT Inst) qui est entré en vigueur le 21 novembre. Le Conseil européen des paiements (EPC en anglais) a ainsi indiqué que près de 600 banques, originaires de 8 pays [1], sont prêtes à proposer ce nouveau moyen de paiement, soit 15 % des prestataires de services de paiement actifs en Europe. Des services de transfert d’argent en temps réel existent déjà dans certains pays. Hors zone euro, le Faster Payment britannique et le suédois Swish sont les exemples les plus aboutis. En Espagne, les banques ont lancé en 2016 une offre commune, Bizum, qui compte 750 000 utilisateurs. En France, les travaux ont commencé, au niveau de STET qui dispose d’ores et déjà d’une plate-forme de règlement pour ces « instant payments », mais aussi des établissements bancaires. Pour ces derniers, le chemin vers une offre commerciale prendra encore quelques mois. « Au printemps 2018 », assure-t-on par exemple au Crédit Agricole. L’équation à résoudre n’est pas des plus simples : d’un côté, le virement instantané demande d’importants investissements pour mettre à niveau les systèmes d’information et les procédures de traitement des paiements ; de l’autre, il ne sera pas aisé de reporter ces coûts sur les clients. « Le virement instantané peut par exemple venir remplacer la carte pour les achats en ligne, mais les e-commerçants n’accepteront pas de payer une commission comme ils sont aujourd’hui contraints de le faire avec les interchanges des paiements par carte », remarque Régis Bouyala, associé gérant chez Pémance. De même, dans un usage « peer-to-peer » de transfert entre particuliers, l’instant payment sera en concurrence avec le cash, gratuit pour les utilisateurs. Difficile là encore d’envisager de faire payer un tel service. « On peut espérer qu’à terme, le succès du virement instantané permette au secteur bancaire d’économiser tout ou partie du coût de traitement des espèces, estimé à 3 milliards d’euros par an. Mais à plus courte échéance, je pense que le modèle économique reposera, non sur un paiement “sec”, mais sur une offre globale de services à valeur ajoutée dont un des aspects est le virement instantané », analyse Régis Bouyala. Pour cela, les banques doivent disséquer la chaîne de valeur de leurs clients, en particulier entreprises, et détecter des marchés de niche. Le règlement immédiat d’un sinistre par un assureur ? Le paiement d’une place sur un porte-conteneurs prêt à partir ? Le règlement des services à la personne et les déclarations associées ? L’essentiel reste à inventer. Propre des marchés bifaces, l’autre condition pour que le succès des offres soit au rendez-vous est l’universalité de la solution : une majorité d’établissements doit se lancer, tant comme émetteur que comme bénéficiaire de transactions d’instant payment, pour que ce dernier trouve son public.

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