La crise de Covid-19 a contraint les sociétés à revoir leurs organisations de travail. Les mesures sanitaires et les différents confinements ont poussé à mettre de nombreux salariés en télétravail, laissant des espaces de travail et bureaux vides. On pourrait donc imaginer que le marché des bureaux a été bousculé par cette crise. Mais qu’en est-il vraiment ? Pour le savoir, Assurland a posé quelques questions à Grégoire de la Ferté, Directeur Exécutif Bureaux Île-de-France de CBRE France, leader mondial du conseil en immobilier d’entreprise.
Avec la crise de Covid-19 et la généralisation du télétravail, la demande en bureaux a-t-elle baissé ?
Oui, la crise de Covid-19 et la généralisation du télétravail engendrée ont forcément eu un impact sur la demande en bureaux en 2020. On a vu le niveau de transactions chuter avec 1,350 millions de m² placés en 2020 contre 2,350 millions en 2019. Il y a néanmoins eu une reprise du deuxième confinement, où l’activité a été moins impactée. En outre, une accélération est attendue au deuxième semestre 2021 avec l’arrivée des vaccins. Un retour à la normale est prévu en 2022.
Les entreprises en lien avec le marché des bureaux ont-elles bien résisté à la crise en 2020 ?
Oui, grâce aux aides gouvernementales notamment, mais pas que. En effet, toutes les entreprises en lien avec le marché des bureaux n’ont pas forcément les mêmes activités et ne dépendent pas toutes des activités de transactions. Il y a des activités comme le conseil, l’accompagnement, la gestion et l’aménagement qui n’ont pas vu leur demande diminuer. Chez CBRE, nous avons donc bien résisté à la crise en 2020, notamment grâce à nos activités complémentaires à la location de bureaux.
Des entreprises ont-elles fait part de leur volonté de réduire la taille de leurs bureaux ?
Oui, mais cette réponse est à pondérer car les deux confinements n’ont pas été les mêmes et n’ont pas eu les mêmes effets. Lors du premier confinement, de nombreux salariés ont été satisfaits de pouvoir expérimenter le télétravail, ce qui n’a pas toujours été le cas lors du deuxième confinement. En effet, le télétravail à 100 % ne convient pas à tout le monde et pour certaines entreprises, ce mode de fonctionnement n’est pas adapté.
De facto, les entreprises s’adaptent à ces nouveaux enjeux : certaines demandent moins des surfaces moins importantes, mais plus qualitatives et correspondant mieux à leurs besoins actuels. De plus, chaque entreprise a son degré de maturité sur le sujet et la réponse varie donc en fonction de ces dernières. Les grands groupes avaient en général plus d’expérience avec le télétravail, mais les plus petites entreprises ont dû s’adapter.
Les prix de location des bureaux ont-ils baissé ?
Non, les prix de location des bureaux n’ont pas vraiment baissé, ou très peu. En général, quand les entreprises réduisent la surface de leurs espaces de travail, elles désirent des locaux neufs ou restructurés. Elles demandent aussi des espaces bien placés à proximité des hubs de transports, où les valeurs sont toujours au rendez-vous. De plus, la demande en mesures d’accompagnement a augmenté et davantage d’entreprises ont souhaité bénéficier de ce type de services, compensant les éventuelles baisses de prix.
La crise de Covid-19 a-t-elle provoqué l’envie de passer à de nouveaux types d’organisations de bureaux comme le flex office ?
Cela dépend des entreprises et de leurs besoins. Le flex office était déjà là avant la crise et va se renforcer pour certaines activités. On se dirige de plus en plus vers une complémentarité entre le bureau, le télétravail et les espaces de coworking.
L’open space permet un travail collaboratif plus efficace et est mieux adapté à certaines activités impliquant des projets collectifs nécessitant la participation en direct de plusieurs individus. Dans le paradigme à venir, les collaborateurs reviendront au bureau pour échanger et créer du lien au sein d’espaces collaboratifs alors que le travail individuel pourra être réalisé chez soi.
Le modèle de l’open space est-il en train de perdre en popularité avec la crise sanitaire ?
Non, cela ne va pas dans le sens de l’histoire. L’open space permet un travail collaboratif plus efficace et est mieux adapté à certaines activités impliquant des projets collectifs nécessitant la participation en direct de plusieurs individus. Dans le paradigme à venir, les collaborateurs reviendront au bureau pour échanger et créer du lien au sein d’espaces collaboratifs alors que le travail individuel pourra être réalisé chez soi.
Quels sont les nouveaux besoins exprimés par les entreprises en termes de bureaux ?
Il faut donner envie aux salariés de revenir au bureau, les rendre plus attractifs et mieux organisés. Il y a aussi une demande en immeubles mieux prévus et conçus d’un point de vue sanitaire, avec des systèmes de climatisation et d’aération en phase avec les besoins liés à la crise sanitaire. En outre, les entreprises sont à la recherche de bureaux neufs ou restructurés, proches des hubs de transports avec des services intégrés. En effet, on considère qu’au-delà de 700 mètres entre la sortie des transports en commun et le bureau, la distance est trop importante. Cela fait perdre du temps aux salariés, impacte la productivité et l’envie de se rendre sur son lieu de travail.
Pourrait-on assister à la reconversion de bureaux en logements, ou n’est-ce qu’un fantasme ?
C’est un sujet qui revient à chaque nouvelle crise. Alors oui, nous allons certainement faire face à ce phénomène étant donné que certaines entreprises diminuent les surfaces, mais probablement pas de façon massive. Ce n’est pas forcément facile à mettre en place : il faut l’accord des mairies et cela peut prendre du temps. Les travaux coûtent cher car les immeubles de bureaux ne sont pas conçus comme les immeubles d’habitation. Autre difficulté : les délais de réalisation sont souvent longs, donc ces projets sont à penser sur le long terme.
Il y a aussi une perte d’espace dans les parties communes d’environ 20 % et cela représente un coût supplémentaire à encaisser : on ne fait pas payer le prix des couloirs aux locataires dans un immeuble. Il y a surtout un point important qui est la valeur. Pour créer de la valeur, il faut qu’un propriétaire puisse compenser le coût des travaux et la perte d’espace par un prix par m² résidentiel plus haut que celui des bureaux.
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